Interview de Pierre Leclercq : l’avant-Citroën. FRENCH/ENGLISH

ENGLISH VERSION AT THE END OF THE POST

L’interview de Pierre Leclercq à lire sur votre site sur un autre ‘post’ publié aujourd’hui, révèle la stratégie qu’il entend déployer après son arrivée à la tête du design Citroën en fin d’année dernière. Avant de découvrir sa nouvelle vie chez le constructeur français, il est bon de lui demander de nous évoquer rapidement son parcours.

« Après quatre ans de design industriel à Liège, en Belgique, j’ai fait ce dont je rêvais depuis tout gamin : accéder à une école de design. En 1996, je suis allé en Suisse à Vevey à l’Art Center mais l’école a fermé quelques mois après mon arrivée. J’ai dû poursuivre mes études dans leur maison mère à Passadena aux États-Unis. »

Voir le site Art Center : http://www.artcenter.edu dont le département Design Transport est dirigé par Stewart Reed ci-dessous :

Les études, cela signifie aussi les stages. Le premier est chez BMW ?
P.L. : « J’ai envoyé mon portfolio chez Pininfarina et BMW. Chris Bangle m’a répondu dans la nuit ! Il m’invitait à rejoindre l’équipe à Munich en 1998. »

Bangle, un designer hors norme. Il a compté pour vous ?
P.L. : « Il a été très important, tout comme Adrian van Hooydonk qui m’a embauché par la suite. On avait une totale liberté de création ! »

Diplôme en mains, il n’y avait pas que BMW dans votre esprit ?
P.L. : « Je sors de l’école en 1999 mais à l’époque BMW est en pleine affaire avec la marque Rover. Je décide de faire le tour de l’Italie avec mon portfolio, chez Bertone, Pininfarina, Zagato. J’ai toujours rêvé de travailler là-bas car les jeunes peuvent s’y exprimer avec une grande liberté. »

Vous faites un passage chez Zagato ?
P.L. : « Lorsque je rencontre Jean-Pierre Ploué chez Ford (voir interview « Leclecq chez Citroën » sur le ‘post’ suivant) il me dirige vers Ghia, le studio de Ford en Italie. Mais j’ai quand même le cœur qui me dit d’aller chez Zagato. Là-bas, j’aurais dû dessiner les Zagato espérées par la direction mais en fait, elles ne sont jamais venues et j’ai dessiné des chariots élévateurs. Après trois mois, j’ai rempli le coffre de ma voiture avec mes affaires et je suis parti directement chez Ghia ! Je ne voulais pas foutre en l’air ma carrière dès mon premier job ! »

Et BMW vous rappelle…
P.L. : « Chez Ford, le studio italien n’était pas franchement soutenu par J.Mays (directeur de la création chez Ford NDA) et il a fermé mais j’en suis parti juste avant car Adrian Van Hooydonk m’a proposé de revenir bosser chez BMW. »

Aux États-Unis chez BMW designworks, vous avez touché à autre chose que l’automobile ?
P.L. : « Non, chez Designworks, les designers automobiles ne font que des autos. »

Les deux dernières années chez BMW à la tête de la division « M » sont spéciales…
P.L. : « J’y ai appris le management. C’est moi qui aie demandé à Adrian à faire autre chose, à faire plus !  Mais il m’a dit que le seul changement qu’il pouvait me donner était de prendre en main le design de la branche « M ». Il venait de ramener les gars du studio « M » à Munich mais ils étaient habitués à être à l’extérieur. Alors le côté social a été compliqué. C’était un beau challenge, j’ai fait mes classes de manager. Mais ça a surtout été l’occasion de travailler sur un super projet BMW de renaissance de la M1 sur la base de la i8. C’est un projet qui devait sortir en série. On avait une voiture assez géniale, mais qui n’a pas abouti pour des raisons plutôt politiques de changements de directeurs dans différents départements. Des problèmes d’égo. Dommage car c’était un beau projet de renaissance de la M1 pour les 100 ans de la marque. »


Lorsque Pierre Leclercq prend la direction du design de la branche “M”, il oeuvre sur une BMW M1 conçue sur la base de la i8. Le projet sera hélas abandonné

Vous passez ensuite en Chine, chez Great Wall Motors. La Chine, un passage obligé ?
P.L. : « Pas du tout ! Mais lorsqu’un designer veut évoluer, il n’y a pas beaucoup d’opportunité car les équipes sont si petites, qu’il faut presque attendre que votre supérieur parte pour espérer évoluer ! J’ai pris l’option de la Chine car j’avais comme mission de m’occuper du design d’un groupe automobile. »

Pendant quatre ans, la transition a dû être difficile à vivre ?
P.L. : « Il y a deux manières d’envisager le métier en Chine. Soit vous vivez là-bas comme un expatrié d’un constructeur européen ou américain, soit vous intégrez un groupe Chinois. Quand j’ai signé, j’étais le premier européen dans une boîte de 60 000 chinois, c’était un choc culturel énorme et une expérience de vie exceptionnelle. On a fait 40 voitures en 4 ans et j’ai participé aux dessins de certaines d’entre elles car quand tu dois composer une équipe de A à Z, au début tu réalises 80% du boulot de style, et au fur et à mesure que l’équipe se complète, tu reprends ton job de manager.

Un autre homme a compté pour vous, Luc Donckerwolke (ci-dessous) qui remplace Peter Schreyer dans le groupe Hyundai-Kia !
P.L. : « Luc a pris un poste important chez Hyundai et Genesis (depuis octobre 2018, Luc a succédé à Peter Schreyer NDA). Il m’offre la possibilité de reprendre la direction du design Kia. C’est génial car je tombe dans une marque internationale, bien organisée…”

Ce n’est pas le cas des marques Chinoises ?
P.L. : « Il existe une différence énorme entre la manière de travailler en Chine et en Corée. Les Coréens comprennent une chose que les Chinois n’ont pas encore comprise, c’est d’investir au bon endroit ! Les Coréens sont très réactifs, ils sont prêts à tout changer tous les deux ans ! »

Pierre Leclercq était destiné à une belle carrière au sein du groupe Coréen, mais il y eut un coup de fil en juillet dernier d’un certain Jean-Pierre Ploué… Voir notre ‘post’ « Interview : Leclercq chez Citroën ”

Vous pouvez découvrir une interview du Bastognard réalisé en Belgique ici : https://www.tvlux.be/portrait_de_pierre_leclercq_directeur_du_design_chez_citroy_n-30964-999-312.html (réalisé par TV Lux en janvier dernier) où l’on comprend que Leclecq a un faible pour l’hydrogène qu’il trouve “fantastique”.

 

ENGLISH VERSION : 

“After four years of industrial design in Liege, Belgium, I did what I had dreamed of since I was a kid: going to a design school. In 1996, I went to Switzerland to Vevey at the Art Center but the school closed a few months after I arrived. I had to continue my studies at their parent company in Passadena, USA. »

Study also means internships. Is the first one at BMW ?
P.L.: “I sent my portfolio to Pininfarina and BMW. Chris Bangle answered me in the night! He invited me to join the team in Munich in 1998. »

Bangle, an extraordinary designer. Did he matter to you ?
P.L.: “He was very important, as was Adrian van Hooydonk who later hired me. We had total freedom! »

Diploma in hand, wasn’t it just BMW in your mind ?
P.L.: “I graduated from school in 1999 but at the time BMW was in full business with the Rover brand. I decide to go around Italy with my portfolio, at Bertone, Pininfarina, Zagato. I have always dreamed of working there because young people can express themselves with great freedom. »

Are you visiting Zagato’s ?
P.L.: “When I meet Jean-Pierre Ploué at Ford (see interview “Leclecq at Citroën” on the following “post”) he directs me to Ghia, Ford’s studio in Italy. But I still have a heart that tells me to go to Zagato’s. Over there, I should have designed the Zagato’s that the management had hoped for, but in fact, they never came, and I designed forklifts. After three months, I filled the trunk of my car with my stuff and went straight to Ghia’s! I didn’t want to ruin my career from my first job! »

And BMW reminds you….
P.L.: “At Ford, the Italian studio was not really supported by J. Mays (Creative Director at Ford NDA) and the studio closed but I left just before because Adrian Van Hooydonk asked me to come back to work at BMW. »

In the United States at BMW designworks, did you touch anything other than cars ?
P.L.: “No, at designworks, car designers only make cars. »

The last two years at the head of “M” Division are special….
P.L.: “I learned management there. I’m the one who asked Adrian to do something else, to do more!  But he told me that the only change he could give me was to take charge of the design of the “M” branch. He had just brought the guys from studio “M” back to Munich but they were used to being outside. So the social side was complicated. It was a great challenge, I did my managerial classes. But above all, it was an opportunity to work on a great BMW project to revive the M1 on the basis of the i8. It was a project that was to end in series. We had a pretty great car, but it didn’t succeed for rather political reasons of changes of directors in different departments. Ego problems. Too bad because it was a great project to revive the M1 for the brand’s 100th anniversary. »

Then you go to China, to Great Wall Motors. China, an obligatory passage ?
P.L.: “Not at all! But when a designer wants to evolve, to rise in rank, there is not much opportunity because the teams are so small, that you almost have to wait for your superior to leave to hope to evolve! I chose China because my mission was to design an automotive group. »

For four years, the transition must have been difficult to live with ?
P.L.: “There are two ways of looking at the business in China. Either you live there as an expatriate from a European or American manufacturer, or you join a Chinese group. When I signed, I was the first European in a company of 60,000 Chinese, it was a huge culture shock and an exceptional life experience. We made 40 cars in 4 years and I participated in the drawings of some of them because when you have to compose a team from A to Z, at the beginning you do 80% of the style work, and as the team completes, you take up your job as a manager.

Another man was important to you, Luc Donckerwolke who replaces Peter Schreyer in the Hyundai-Kia group !
P.L.: “Luc has taken up an important position at Hyundai and Genesis (since October 2018, Luc has succeeded Peter Schreyer NDA). It gives me the opportunity to take over the direction of Kia design. It’s great because I’m falling into an international, well-organized brand…”

Isn’t that the case for Chinese brands ?
P.L.: “There is a huge difference between the way of working in China and Korea. The Koreans understand one thing that the Chinese have not yet understood, it is to invest in the right place! The Koreans are very reactive, they are ready to change everything every two years! »

Pierre Leclercq was destined for a great career with the Korean group, but there was a call last July from a certain Jean-Pierre Ploué… See our “post” “Interview: Leclercq at Citroën “Leclercq

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