Dans les années 1970, le monde du transport se posait déjà la question de la mobilité du futur. Les visionnaires d’alors nous trimbalaient dans des tuyaux à air comprimé avec des navettes automatiques ! Chez Volkswagen comme partout ailleurs dans les bureaux d’études des constructeurs automobiles, les travaux sur la voiture dans laquelle le conducteur peut déléguer des phases de conduite ont cours depuis des décennies.
Le constructeur allemand s’amuse d’ailleurs à dire que la première voiture autonome est une Coccinelle célèbre : Choupette ! Elle est apparue sur les écrans de cinéma en 1968 et ce sympathique engin montrait aux ingénieurs de Volkswagen qu’une voiture pouvait se débrouiller seule dans le trafic et même prendre le volant si nécessaire !
Il faudra pourtant attendre quelques années avant que les ingénieurs allemands développent des solutions de mobilité du futur. Ils participèrent au projet européen de recherches “Prometheus” lancé en 1986. Outre les constructeurs et les équipementiers, cette initiative a rassemblé en Allemagne des organismes tels que l’Institut Fraunhofer pour l’information et pour le traitement des données mais aussi l’Université des Forces Armées Fédérales allemandes à Munich.
Volkswagen a ainsi débuté les travaux sur le « Lane Assist » à bord de la Golf : une de caméra dans le rétroviseur captait les lignes de démarcation des voies pour évaluer la position du véhicule (ci-dessous le système en 2018). Si la voiture commençait à dériver de sa voie, le système donnait une légère impulsion pour corriger la direction. À l’époque, les fonctions qui sont aujourd’hui de banales options ou équipements de série étaient encore du domaine de l’utopie !
Dirigée par le Dr Walter Zimdahl, une équipe du département de recherche créée en 1970, a ouvert la voie aux voitures autonomes avec leurs projets de recherche de « pilotage automatique avec contrôle par ordinateur ». Le Dr Zimdahl a eu l’idée en 1982, alors qu’il a découvert une splendide et efficace caméra TV plutôt compacte d’un fabricant japonais d’électronique.
« Nous considérions cela comme un substitut à l’œil humain. Il fallait alors le relier à un système de direction électrique. L’évaluation de l’image était relativement fiable grâce aux contrastes de luminosité entre les marques de voie et la surface de la route. Détectées, ces images étaient alors converties en signaux de commande pour la direction par le biais d’un processeur encore assez primitif. Nous avons effectué ces essais à bord d’une Golf 2. »
Une caméra dans le pied du rétroviseur intérieur est une évidence aujourd’hui. Mais le matériel des premiers tests sur une Golf 2 manquait cruellement de “compacité” !
Et puis les travaux ont suivi l’évolution des microprocesseurs. L’idée sous-jacente était « d’imiter les principales fonctions humaines en les pilotant grâce à l’électronique et à une mécanisation fiable et compacte. » La caméra miniature accrochée à la hauteur du rétroviseur a, dès le début des travaux, pris la place de… l’œil humain. On la trouve désormais sur la majorité des voitures vendues en 2018. « Mais à l’époque, cette caméra était à peu près de la taille d’un gros étui à lunettes et, avec un objectif grand angle, balayait une zone située entre 4 et 25 mètres devant le véhicule. »
Mais le plus dur ne fut pas de collecter les informations. Ce sont les étapes de commandes via ces informations qui furent plus complexes à mettre en œuvre. « Les systèmes de direction électromécanique ou électrique nous auraient bien aidés, mais rien de tout cela n’était disponible à l’époque. Nous avions donc un moteur électrique installé parallèlement à la colonne de direction, puis relié directement à la direction par un réducteur. » Tout ceci manquait singulièrement de compacité.
« Vous imaginez qu’il y avait toujours quelqu’un assis sur le siège du conducteur avec les mains prêtes à intervenir en cas d’urgence ! »
Une Volkswagen Passat B6 break en 2008, avec tout un équipement radars et caméras capable de lire la route : c’est l’ancêtre de la voiture autonome chez VW. Son petit nom ? “Caroline” !
L’étape suivante fut de mettre sur la route une voiture à conduite totalement autonome.
« Cette voiture, c’était une Passat B6 que nous avons appelée « Caroline.» (ci-dessus) L’université technique de Braunschweig a démontré ce qui était possible de réaliser à ce stade avec l’aide de caméras, de lasers et de radars. C’était en 2008, voici déjà dix ans ! Caroline était capable de trouver son chemin seule, même dans le trafic. Tous nos tests ont été menés jusqu’à la vitesse de 100 km/h. » De quoi avoir peur au début, non ? « Pas du tout » assure le Dr Zimdahl. « J’ai vraiment eu une confiance absolue dans nos études et dans notre travail de développement. »
Le Dr Adolf Kalberlah, chef du département de recherche du futur, se souvient d’une démonstration technologique sur le site de test d’un concurrent à Munich, également impliqué dans le projet Promotheus : « nous avions deux véhicules avec nous qui étaient dotés de la conduite autonome et un troisième bus transportait tous les chefs de développement et directeurs de recherche. J’étais responsable de la mise en place d’un mur de polystyrène à un certain endroit, devant lequel les voitures se sont arrêtées automatiquement à l’aide de capteurs de distance, de radars et de caméras frontales. La réussite de ce test qui paraît aujourd’hui assez simple m’a valu une salve d’applaudissements ! »
À entendre les ingénieurs de Volkswagen, les débuts de la voiture autonome chez ce constructeur semblent un tantinet puérils mais, comme le rappelle le Dr Adolf Kalberlah “nous sommes arrivés grâce à ces travaux débutés voici quarante ans, à développer aujourd’hui le cinquième stade de la conduite autonome, entièrement automatique, pour les décennies à venir !”