Bienvenue à bord de C5 X. Vous avez le droit de toucher, caresser les matériaux, prendre en main le volant qui intègre un épais élément de mousse, comme les accoudoirs. Mais vous n’aurez pas droit à une sellerie claire… Hélène Veilleux, responsable des matières et couleurs chez Citroën, vous guide dans ce cocon de cinq (vraies) places.
Hélène Veilleux a suivi une formation à l’école Duperré (https://duperre.org/) avant de faire ses classes chez Habitat, au studio de design. Voici vingt ans qu’elle a intégré le groupe PSA, aujourd’hui Stellantis. Après une période chez Peugeot où nous l’avions rencontrée pour la genèse du concept-car BB1 (ci-dessous, deuxième en partant de la gauche), elle est nommée par Jean-Pierre Ploué, l’un des deux directeurs des styles du groupe, responsable des couleurs & matières chez Citroën en 2014.
Linda Jackson l’ex-patronne de Citroën pendant six années et aujourd’hui à la tête de la marque… Peugeot, nous a souvent expliqué que le concept-car CXperience servirait de base à l’étude de la grande berline de 2021. Qu’en est-il des couleurs & matières ? « On s’est justement attelés à introduire l’effet bois qu’il y avait à bord du concept. Sur ce dernier, c’était du bois découpé au laser. On a réussi à industrialiser un matériau qui donne cet effet. »
Cette nouvelle technologie est-elle pour autant réservée à Citroën ? « Oui, tout à fait. On a déposé ce décor avec cet effet de découpage au laser. On y retrouve d’ailleurs les chevrons. C’est un dessin spécifiquement déposé pour Citroën, mais les autres marques du groupe pourraient éventuellement rependre la technologie, mais pas l’aspect. »
La C5 X est une grande routière du segment D, un segment qui a ses propres codes, bien différents de ceux des SUV ou des berlines compactes. Il n’existe ici par exemple que trois déclinaisons de décor. « L’une d’elles qu’on appelle Gun Metal a un effet carbone, mais vous pouvez opter pour une finition plus lumineuse avec des décors typés aluminium. La planche de bord dispose quant à elle d’un choix de deux bandeaux différents avec le grain chevron, l’une classique ou l’autre avec une couleur qui tire sur un gris-vert. » Cette pièce qui structure le milieu de la planche de bord est appelée le « muscle » par le design intérieur.
Pour revenir à notre référence CXperience, nous sommes surpris de ne pas trouver plus de teintes claires à bord, sans même parler du jaune du concept ! « Vous évoquiez le positionnement de la C5 X dans le segment D, d’où notre réflexion qui nous a amené à ne pas retenir le jaune du concept ! On a mis le focus sur des ambiances avec des gris colorés et surtout, on a aimé proposer la lecture du chevron un peu subliminale sur de nombreux supports : le chevron se retrouve dans les perforations des sièges, sur la bande du haut de dossier, sur les surpiqûres identitaires. Tout ceci en restant très discret. Quand on regarde le siège de face, on devine la trame chevronnée qu’on retrouve également sur le décor de coiffe de planche par exemple. C’était un beau terrain de jeu ! »
Un terrain de jeu qu’on retrouve sur le récent C3 Aircross restylé. « C’est effectivement le même vocabulaire. On se doit de raconter la même histoire et apporter une signalétique du chevron dans tous nos véhicules. Cette cohérence permet à la clientèle de voir qu’il existe un fil conducteur créatif dans notre gamme. Il nous faut toujours l’alimenter avec de nouvelles trouvailles. C’est un peu l’idée de griffe dans la haute couture. » De par ses volumes de ventes relativement limités par rapport aux segment B (C3/208/Clio) ou C (C4/308/Mégane), le segment D n’est-il pas au contraire le terrain idéal pour oser intégrer de nouvelles teintes ? « On s’est avant tout vraiment attelé à mettre l’accent sur des détails, et la subtilité plutôt que de mettre des couleurs très saturées. On a à bord la possibilité d’avoir des sièges coiffés en partie supérieure d’un cuir bleu Saphir, très élégant (ci-dessous). » Mais il n’y a pas de teintes de sellerie claires, comme sur presque toutes les concurrentes de la C5 X.
Surprenant ? Pas à en croire Alexandre Cazeaux, le chef de projet : « les clients veulent du cuir et lorsqu’ils choisissent ce matériau, ils le veulent de couleur noir, c’est comme ça et c’est un incontournable à respecter. Dans le premier cahier des charges, je ne voulais pas de cuir noir, mais les tests l’ont imposé ! Au bout d’un moment il faut proposer ce que le client demande. On essaye d’avoir des choses plus colorées, et Hélène et ses équipes ont travaillé ces thèmes, mais ce que l’on peut se permettre sur C3 ou C4 n’est pas possible sur C5 X. On a fait beaucoup d’essais sur ce programme, notamment en habillant les inserts de portes du bleu Saphir, et même d’autres éléments vers la console, mais ça ne fonctionnait pas en tests. »
Sortons du cocon confortable de la C5 X pour évoquer les teintes de caisse. Elles sont limitées à six pour la grande Citroën, ce qui est dans la fourchette basse de la catégorie. Parmi elles, le bleu d’une des deux C5 X qui étaient mises à notre disposition. Une nouvelle teinte de lancement ? « Non, même si on se bat toujours pour avoir une teinte emblématique. Mais il ne sert à rien d’en développer une si on dispose d’une teinte dans le groupe qui fait le travail ! » nous répond Hélène Veilleux. « Ce bleu n’est pas nouveau dans le groupe mais c’est la première fois qu’il est employé sur ce type de silhouette. C’est un parti-pris fort. Avec cette teinte, vous avez aussi la confirmation d’une vraie cohérence entre l’extérieur et l’intérieur avec le bleu Saphir en partie haute des sièges. On a la même chose avec la teinte de caisse Smart Grey et le haut des dossiers en cuir gris-vert. »
Dernière question à plus long terme : la tendance est à la fin de l’utilisation des cuirs bovins. Peut-on imaginer d’autres matériaux à plus ou moins long terme ? « D’abord, il faut être clair. Chez Stellantis, on ne tue pas les vaches pour faire du cuir, ce sont des cuirs de vaches destinées à l’élevage pour la viande » affirme Alexandre Cazeaux. Quant aux matériaux futurs capables de remplacer le cuir bovin, Hélène Veilleux travaille avec ses équipes et les équipementiers « sur des matériaux de synthèse, des cuirs de poisson, de champignons et même d’ananas, mais ils doivent passés énormément de tests avant d’être validés un jour pour la série ! Il y a énormément de recherches car notre patron de marque nous pousse à trouver des alternatives. »
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