Nous y voilà ! Alpine dévoile mardi prochain au Mondial, 85% de son futur crossover sportif 5 places qui sera commercialisé en 2025. L’A390 de demain apparaît au travers de ce concept-car A390-β dont l’extérieur est pratiquement fidèle au futur modèle de série, contrairement à l’intérieur totalement prospectif et dans lequel « rien n’est symétrique ! » comme l’écrit à bord l’un de ses designers.
Sportif écrivons-nous ? C’est le constructeur qui l’affirme en expliquant que l’A390 de série est « pensé pour un usage quotidien mais il est capable de se métamorphoser en bête de course comme l’iconique A110. »
Ah l’A110 ! Tel un Phoenix secouant les braises de sa renaissance en 2017, ce modèle s’est depuis taillé une belle réputation. Mais il s’engouffre à haut régime dans la dernière ligne droite, celle de sa fin de vie avant d’être renouvelé en 2027 par deux variantes 100% électriques : coupé et cabriolet. L’A110 du futur (proche) inaugurera la nouvelle plateforme APP dont héritera également la future A310 4 places (plus longue, ci-dessous) en 2028. De vraies Alpine avec une plateforme dédiée…
En 1968, j’avais sept ans et l’un des amis du paternel roulait en A110 jaune. D’elle, je ne me souviens que de l’odeur de colle et je trouvais qu’elle sentait moins bon que la colle aux amandes qui traînait dans mon cartable. L’A110, je la trouvais géante, logeable et c’est bien plus tard que je me suis rendu compte que c’était mon regard d’enfant qui la trouvait « géante ». Car l’A110 est une minuscule biplace qui perpétuera le mythe pour l’éternité lorsqu’elle débarquera avec son – ou ses ? – moteur(s) électrique(s) en 2027.
Car oui, il faut arrêter le déni : Alpine ne produira que des voitures à chaînes de traction électriques avec les A290, futures A110, A310 et la prochaine A390 dévoilée ici. En 2021 avec la Renaulution, on a bien compris le discours de Luca de Meo qui, à la surprise générale, a fait monter Alpine sur le podium des trois marques du groupe, en compagnie de Renault et de Dacia. Mais la contrepartie était d’ancrer Alpine dans un futur que l’on imagine encore aujourd’hui 100% électrique.
Pour Renault et Dacia, cette stratégie n’est pas la seule puisqu’elle cohabite avec l’hybridation. Pour Alpine, le plan produit vogue à grande vitesse vers le tout électrique… mais ne néglige pas en coulisse une possible motorisation thermique alimentée par l’hydrogène. L’A390 de série quant à elle repose sur la plateforme AmpR Medium des Scénic et Megane. Si ce soubassement est partagé, il est « fortement remaniée » précise le constructeur. On le verra à la fin de ce sujet.
Et le design de cette A390 alors ? Ne l’appelez pas SUV car ce n’en est pas un. En termes d’architecture, on en est loin. Plutôt que l’appellation crossover un peu passe-partout, Alpine a choisi la dénomination de Sport Fastback. SF, comme Science-Fiction. Là, c’est presque la réalité. Et on est très favorablement impressionné par la faculté qu’ont eu les designers – menés par Antony Villain – d’intégrer quelques codes de l’A110 dans le dessin de ce « grand » véhicule sportif 5 places. N’aboyez pas avec ceux qui pensent – et c’est tout à fait leur droit – que « cette Alpine A390 n’a rien à voir avec une vraie Alpine » : sans elle et sans les futurs produits, la marque ne serait pas pérenne. Fin du débat.
Revenons à ce qui nous passionne : le design ! Les codes esthétiques de l’A110 se ressentent essentiellement dans la partie arrière, entre les flancs et l’amorce des galbes du volet de coffre. Le tout est soutenu par un montant C au-dessus du passage de roue arrière très dynamique, presque identique à celui de la berlinette. Ajoutons le principal : la lunette arrière reprend la géométrie de celle de l’A110. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas écrit : l’A390 n’est pas une grosse A110. Ce n’est pas son rôle. Mais l’exercice inédit de créer une nouvelle Alpine « familiale sportive » n’était pas gagné d’avance. À LIGNES/auto, on aime car l’ensemble est vraiment rafraîchissant !
Ça tombe bien, la marque Alpine a été nommée ainsi par Jean Rédélé en l’honneur des Alpes, et la neige autant que les flocons servent de fil conducteur au design extérieur et intérieur. Caractéristique évidente du volume de l’A390 : sa partie habitacle supérieure est ici traitée comme une bulle vitrée. Avec une telle luminosité, on se croirait à l’intérieur d’une boule à neige, prêt à contempler la montagne. Ne me secouez pas trop, j’ai un texte à finir…
Si on ne sait pas encore comment sera traité le véhicule de série sur ce point, la solution de cette bulle supérieure pose littéralement l’engin sur ses roues avec une masse de caisse bleutée – la nouvelle teinte Bleu Secular – qui apparaît d’un coup plus légère. Non, l’A390 n’est pas un SUV.
L’arrière ci-dessus se caractérise par une signature lumineuse intégrant trois éléments : un bandeau entrecoupé du nom Alpine, une trentaine de points lumineux triangulaires de part et d’autre du bouclier (Alpine les appelle Cosmic Dust ou poussières cosmiques) et enfin, des éléments aérodynamiques eux aussi finement éclairés. Poussières cosmiques : est-ce un clin d’œil à Tesla et à la fusée Starship d’Elon Musk, conquérant du cosmos ?
Le déflecteur inférieur ci-dessus peut se déployer vers l’arrière sur huit centimètres, embarquant avec lui la rampe lumineuse de feux. Ce principe évoque immédiatement le concept-car Renault Morphoz de 2020 ci-dessous, dessiné par l’équipe de François Leboine, aujourd’hui patron du design Fiat.
Mais si dans ce dernier cas l’allongement profitait à l’habitabilité, dans le cas de l’Alpine, il s’agit avant-tout d’améliorer l’aérodynamique et de gagner quelques kilomètres d’autonomie. Alpine maximise ainsi le concept des “aéroblades” vu entre autres sur le concept Opel Flextreme GT/E de 2010 et la Renault Eolab de 2014.
De face, ci-dessous, le changement d’identité de marque est radical. C’en est fini des optiques (presque) rondes, place à la signature lumineuse déflorée par le concept-car Alpenglow. Une lame transversale et éclairée, surplombe quatre optiques extrêmement fines, le tout intégré dans un léger masque, alors que l’on retrouve juste en dessous ces optiques, les fameuses poussières cosmiques et, au centre, le nom Alpine éclairé.
Les flancs sont solidement emboutis d’arêtes nettes et franches qui imposent un mouvement subtilement modelé dans les portières. Il diffuse la lumière de manière très travaillée jusqu’au niveau des passages de roues musclés. Si la carrosserie est celle du véhicule de série, je souhaite un joyeux Noël aux emboutisseurs. J’ai un faible pour les emboutisseurs, ces hommes et femmes de l’ombre qui s’arrachent les cheveux dès qu’ils s’approchent d’une maquette Clay enfantée par les designers, souvent tarabiscotée (la maquette, pas les designers. Quoique parfois…). On les salue…
Abordons maintenant un sujet qui nous interpelle : le fameux « Flying bridge » ou pont volant. Kézako ? Ce sont les prises d’air passant sous la partie antérieure du capot et qui favorisent un meilleur écoulement du flux d’air. On le devine très nettement ci-dessous. Or, on retrouve ce même principe sur le prototype Renault Emblème qui sera présenté à quelques mètres seulement de l’A390-B, dès mardi 15 octobre au Mondial.
On sait que dans le secret de l’atelier de maquettage du groupe Renault, au sous-sol du bâtiment design de Guyancourt (78), il n’y a plus de cloison. Les différents patrons de design du groupe (Antony Villain pour Alpine, Gilles Vidal pour Renault, David Durand pour Dacia et Jean-Philippe Salar pour Mobilize) voient ce que font les équipes « concurrentes ». Est-ce donc logique dès lors de voir apparaître concomitamment une solution identique sur deux concepts du même groupe ?
« Mais monsieur Bonnaud, ce pont volant est simplement l’une des formules en vogue pour améliorer l’aérodynamique. C’est donc parfaitement en phase avec la conception de nos futurs modèles 100 % électriques » me dit une petite voix en provenance de Guyancourt… Et dire que dans mes élucubrations les plus folles, j’avais imaginé que la Renault Emblème ci-dessus dérivait d’un crossover Alpine dont le programme a été abandonné. Il faut que j’arrête le thé vert.
Profitons d’une tempête de neige pour nous abriter à bord. Ici, rien ne préfigure le véhicule de série. C’est un bis repetita du concept-car A290-β : à l’extérieur on annonce, à l’intérieur on se défonce ! L’équipe du design intérieur s’en est donnée à cœur joie et là encore, c’est le rafraîchissement assuré. « Si tu le fais bien c’est bien, si tu le fais vieux c’est vieux, si tu le fais moderne c’est moderne » est-il inscrit blanc sur noir sur une plaque à bord de l’A390-β.
Antony Villain précise que « l’extérieur coloré contraste avec l’intérieur monochrome. Le minéral noir et acéré s’oppose à la blancheur de la neige immaculée. » La neige immaculée dans la conception, donc. “La technologie cohabite avec la nature, le brut avec le raffiné, le chaud avec le froid…”
“Le poste de conduite, lui-même, a deux visages, d’une simple action sur la commande centrale, il se transforme en cockpit de Formule 1″ ajoute Antony. Et ce, grâce à une double position de conduite couplée à la modification de la géométrie du volant et à un déplacement des pédales.
Et oui, l’A390 de demain ne passera pas ses journées à trimbaler les enfants du club de sport à la maison. Non, il y aura un pilote à bord. À l’avant, on découvre une ambiance très technologique appuyée par un habillage minéral…
…À l’arrière ci-dessus, c’est tout l’inverse : repos dans un épais tapis de poudreuse. Ce contraste fait de deux mondes différents dans l’habitacle n’est pas nouveau en soi mais il interpelle ici car il est travaillé dans ses moindres détails. Et dans ces détails, j’ai trouvé plein de diablotins qui se disent que ce concept, « c’est brut de pomme ! »
Techniquement, vous en saurez plus chez nos confrères spécialisés. Annonçons aujourd’hui que la première mouture de l’A390 adoptera deux moteurs électriques sur le train arrière et un troisième à l’avant. La dynamique est gérée par le système de « l’Active Torque Vectoring » capable de contrôler la répartition du couple entre les trains avant et arrière, en y ajoutant le contrôle indépendant de ce couple sur la roue arrière gauche par rapport à la droite, améliorant évidemment le comportement en virage, ci-dessous. « Un jeu d’équilibre » nous dit-on « qui octroie au véhicule la sensation de légèreté de l’A110. » Alors, convaincu que l’Alpine A390 n’est pas un SUV !?
Une Alpine assemblée à Dieppe
Comme l’annonce fièrement le constructeur, l’Alpine 100 % électrique sera 100 % française. “La version de série de l’A390 sera fabriquée dès 2025 dans la Manufacture Alpine Dieppe Jean Rédélé, sur base de la plateforme AmpR Medium. Ses trois moteurs électriques proviendront de la Megafactory de Cléon et les batteries seront ensuite assemblées à Douai, confirmant ainsi la fabrication en circuit court de la future A390.“
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