En 1993/1994, alors que la Twingo fête sa première année de commercialisation, le designer Renault Axel Breun (*) voit ressurgir ses démons et sa passion pour les engins sportifs. Ce jeune talent, qui a suivi Patrick le Quément de Volkswagen à Renault, s’est offert une Berlinette A110 lorsqu’il était jeune conducteur (ci-dessous).
Sa passion pour Alpine est bien vivace. Comme celle qui touche des engins plutôt extrêmes. Et que fait un designer lorsqu’il rentre chez lui après sa journée de travail ? Il continue de concevoir toutes sortes de projets. C’est ainsi que sur son temps libre, Axel Breun va concevoir une Twingo qui repose… sur un châssis de Ferrari 308/328.
« J’avais alors constaté que la Twingo et la Ferrari avaient le même empattement. Il me suffisait alors de trouver une Ferrari accidentée pour poursuivre mon projet, car j’avais la caisse d’une Twingo nue, un « reste » du développement du concept-car Argos ! »
Hélas, il ne trouve pas la Ferrari accidentée dans son budget pour en récupérer le châssis, et le projet en reste là. Enfin, pas tout à fait. Nous sommes alors en 1995 et Renault vient de présenter son Spider qui ouvre la voie à de multiples réflexions. Le projet “privé” d’Axel Breun prend alors le chemin “officiel” du bureau de design. L’idée demeure pratiquement la même : coiffer un châssis de sportive d’une carrosserie de Twingo.
Cette fois, c’est bien sûr le châssis du Spider qui est retenu, avec toujours cet empattement de 2,34 m. Et le moteur choisi n’est pas n’importe lequel : c’est le V10 de la F1 ! Ce même moteur qui vient de se loger dans la caisse d’un Espace présenté au salon de Paris 1994 ! Axel Breun confira plus tard que “ce programme fut poussé jusqu’au stade de la maquette 1/5e.” Ci-dessous.
Mais rien ne se perd lorsque l’idée de base est excellente ! En 1998, le programme de série X65 est dévoilé : il s’agit de la deuxième génération de Renault Clio. Très vite, le projet d’une Clio Maxi (le premier nom du projet de Clio V6) est élaboré chez Renault avec l’intention de refaire le coup de la R5 Turbo de 1980 (maquette dévoilée en 1978…) Ce programme reprend l’architecture à moteur central arrière de la R5 Turbo mais le quatre cylindres fait place ici au V6 ES9 de 3.0 litres.
Axel Breun propose alors un design bien plus radical qu’il ne l’a été au final. Au lancement du programme « Clio Maxi », la caisse en composite repose une fois encore sur le châssis du Spider. Axel y greffe des portes « ailes de mouette » (ci-dessus) qui ne seront pas retenues pour la série mais que le designer arrivera à placer sur la… Mégane Trophy II (ci-dessous). Une fois encore, le projet est abandonné en l’état après qu’une maquette échelle 1/1 a été produite par le studio D3.
La Renault Clio V6 arrivera néanmoins sur le marché dans des délais très courts, avec un engin dérivé de la structure de la Clio II et produit par TWR, le Tom Walkinshaw Racing (ci-dessous). Trop rapidement mis en vente, ce premier jalon de l’histoire de la Clio V6, de 230 ch et produit en… Suède, n’a pas laissé que de bons souvenirs. Il s’en est écoulé 1 513 exemplaires.
Renault Sport reprend donc la main sur la mise au point de la deuxième génération qui apparaît en 2003 (ci-dessous) avec une puissance portée à 255 ch. Elle est produite à Dieppe, ouf ! Le comportement routier est cette fois maîtrisé et 1 309 exemplaires viendront s’ajouter au total des ventes de cette exceptionnelle Clio.
Luca de Meo explique aujourd’hui qu’il faut que Renault retrouve ses valeurs d’audace et de concepts forts. Il suffit que les équipes s’inspirent du travail réalisé par leurs aïeux.
(*) Axel Breun, designer Renault, a notamment été responsable des concept-cars Renault de 2009 à 2014. On lui doit entre autres la genèse du concept-car Alpine A110-50 (ci-dessous), un jalon fort dans l’histoire de la renaissance de la marque !