Lorsque Gilles Vidal a quitté Peugeot pour Renault (voici plus de deux ans…) nous lui avions demandé si c’était la crise de la cinquantaine qui l’avait poussé à prendre cette décision. L’emblème Renault pas encore sec sur sa veste de costume, il nous avait répondu que non, « car aller vers une autre marque où l’on va découvrir une nouvelle identité, une nouvelle philosophie, un nouvel ADN et puis inventer la suite, à un moment où Renault change de paradigme, c’est très intéressant. »
Deux ans se sont passés depuis ces paroles. Après le concept-car de la prochaine Renault 5 électrique qui a troqué l’orange Andalou de l’originale pour un jaune pétillant, après le futur Renault Scénic (concept Scénic Vision ci-dessus) qui plonge sa caisse dans l’encre noire et son habitacle dans un blanc ivoirin, « voici venu le temps des rires et des chants » pourrait chanter l’orange Casimir. Car avec le concept 4Ever Trophy, « c’est tous les jours le printemps. »
Dommage qu’il s’habille d’un gris bien éloigné des R4 Safari de 1975, Jogging de 1981, voire tout simplement de l’orange d’une R4 de 1968 (ci-dessous) avec sa nouvelle calandre qui a inspiré celle du concept-car. Car, oui, le concept-car 4Ever Trophy annonce la future R4 électrique qui sera commercialisée en 2025, un an après la R5.
Pour nous convaincre, Gilles Vidal nous explique qu’il faut garder en tête toutes les parties de la carrosserie en gris clair, gommer l’énorme semelle du concept Trophy, et vous avez devant les yeux la R4 de série qui viendra épauler sa cousine thermique Captur sur le marché. Et la R5 viendra en faire de même avec la Clio thermique, tout en remplaçant à terme la Zoé.
« Ce qui est intéressant avec la Renault 4 » nous dit Gilles Vidal, « c’est que c’est une voiture assez universelle, avec 8 millions d’exemplaires vendus (8.135.424 exemplaires de berlines et fourgonnettes jusqu’en 1992), elle a été commercialisée dans une centaine de pays mais elle a été présente partout dans le monde, sans exception. Elle a accompagné toutes les cultures dans tous les pays, elle a transporté des bottes de foin dans les fermes et campagnes les plus reculées, mais elle a aussi transporté des familles, a aussi servi de support à des photos de mode avec de célèbres actrices pour les magazines Vogue ou Elle. » Ci-dessous.
« A l’origine, elle reste donc un engin simple, passe-partout et assez baroudeur. C’était finalement un objet design en termes de fonctionnalités. Côté esthétique, le projet de la 4Ever est bien sûr plus compliqué que celui de la R5 dont la silhouette est adorable, appropriable immédiatement. Mais c’est bien pour une équipe de designers, c’est un beau challenge ! »
« On a travaillé comme pour la R5 et on s’est demandé ce que l’on active comme éléments de reconnaissance sans opérer un copier-coller, et faire en sorte que même des jeunes soient attirés sans connaître le modèle original. Ces codes passent par la gélule oblongue qui intègre les phares et le logo, avec un mouvement sous les yeux. Les phares ronds de la R4 des années 60’ sont tronqués pour conférer un regard plus assertif. »
« Autre code important, la 3e vitre latérale fixe, implantée juste au-dessus de la roue arrière, un élément graphique typique de la R4 ainsi que ses feux AR feux verticaux. Évidemment, leur traité est différent avec ce soin apporté aux modelés, la tôle qui les affleure et donne un côté très High-Tech dans l’exécution des formes. »
« La Renault 4 avait des protections conçues avec des tubes formés aux extrémités des pare-chocs. On les a repensés en éléments intégrés au bouclier qui n’ont rien à voir avec leurs ancêtres dans leur forme, mais qui ont la même fonction. Et puis nous n’avons pas sacrifié la fonctionnalité au titre de l’esthétique. On compose pour pouvoir tomber amoureux au premier coup d’œil tout en conservant les prestations et fonctions de la R4. Vous verrez sur le modèle de série que l’on a beaucoup travaillé sur l’entrée de coffre, pas encore visible sur ce concept Trophy. »
« A bord, on a travaillé le volume et l’habitabilité sans oublier la modularité et l’accessibilité qui sont des éléments importants dans ce projet R4. On va chercher à être créatif dans les détails pour apporter du soin dans toutes les zones de la voiture, y compris dans des zones extérieures souvent négligées, comme les protections des ailes qui sont exagérées bien sûr sur le concept Trophy. ».
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“Réactiver les éléments de reconnaissance” : l’explication par la photo.
En quelques mots et des photos, voici comment l’équipe de design a réinterprété les codes de l’ADN de la Renault 4 des années 1960 pour la future R4 de 2025. Ci-dessous, on perçoit très nettement cette ligne qui vient du flanc de la voiture et qui plonge de l’aile sur le bouclier. Cette courbe est directement empruntée à la voiture originelle.
Le choix de la calandre de référence s’est porté sur celle de l’année modèle 1968 (ci-dessous), apparue en septembre 1967 sur la R4. Les designers ont tenté d’y implanter pour 2025 des phares ronds, mais l’équilibre n’y était pas. Les optiques ont donc été tronquées et sont évidemment bien plus technologiques (!) alors qu’un mouvement d’ondulation a été ajouté sur la ligne inférieure de la calandre pour donner plus de dynamisme.
La R4 de 1961 se caractérisait par sa troisième vitre latérale de forme triangulaire et implantée juste au dessus de la roue arrière. Un principe qui a été calqué par la R4 de 2025. Le cerclage lumineux ne sera évidemment pas retenu sur le modèle de série.
Élément totalement structurant du style de la voiture des années 1960 : la ligne qui ceinture le pourtour de la R4 (ci-dessous) a été réinterprétée de façon magistrale sur le modèle de 2025. Le coffre n’a pas encore été délimité sur le concept mais son ouverture et la modularité intérieure ont été peaufinées pour améliorer les prestations qu’on attend de ce futur Crossover à tout faire.
Dernier élément distinctif à l’extérieur, le feu vertical de la R4 de 1961 avec des trois plots lumineux a été conservé avec là encore une technologie du moment. L’implantation du nouveau feu – dont le design est proche de celui de la série – est réalisée de manière très affleurante et soignée au niveau des galbes de raccordement.
LE DÉFI DE LIGNES/auto LANCÉ A GILLES VIDAL
Puisque le but est de réactiver les éléments de reconnaissance de la Renault 4 originelle dans le futur SUV électrique du segment « B », nous mettons au défi Renault et les designers intérieur de la 4EVER de 2025 d’implanter « quelque chose » à bord qui rappelle le levier de vitesse emblématique de la « 4L ».
A l’époque, ce détail s’ajoutait à d’autres qui avaient poussé le patron de Citroën (Pierre Bercot) à vouloir intenter un procès à Renault pour plagiat (lire notre article “Cette fois Citroën ne fera pas de procès à Renault” sur ce site). Alors, que faire d’un levier de changement de rapport de boîte de vitesses, lorsqu’il n’y a plus de boîte de vitesses ? Vous avez (presque) trois ans pour trouver.
Mais comme LIGNES/auto est sympa, voici nos propres idées pour transformer ce levier en :
– commande manuelle des essuie-glaces, comme sur les premières 2CV
– ouverture intérieure de la trappe de recharge extérieure
– porte sac à main
– commande de mise en marche « Start your engine » avec poignée translucide qui vire du rouge au bleu électrique.
– commande du siège éjectable passager, uniquement fonctionnelle lorsque Belle Maman s’assoit à bord (qui aime bien châtie bien...)
– commande de bascule de la planche de bord qui laisse alors apparaître un écran géant pour la future 4EVER de délégation de conduite niveau 4
Vous voyez, ce n’est quand même pas très compliqué. A vous de jouer !