

Bienvenue à l’ADN, l’Automotive Design Network (ci-dessous) du groupe Stellantis situé en banlieue ouest parisienne et implanté juste en face la base militaire de Vélizy-Villacoublay. Ce site inauguré voici plus de 20 ans (c’était en 2004) a été conçu pour réunir l’ingénierie et le design du groupe PSA de l’époque dans un même lieu. De nombreux constructeurs ont choisi cette voie, à l’image du dernier centre de design Renault en Inde, réhabilité au cœur même du centre de recherche de Chennai.

Mais la vente à tout va des bâtiments du groupe Stellantis, ou l’arrêt de leur location, comme au 75 avenue de la Grande Armée ex-siège de PSA, a quelque peu ébranlé cette certitude. L’ADN n’est plus côtoyé par l’immense structure d’ingénierie de Vélizy, récemment déplacée à Poissy. Quoi qu’il en soit, il abrite toujours les centres de design de Peugeot, avec sa terrasse oblongue côté autoroute N118 et, à l’opposé du bâtiment, celle de Citroën, plus carrée. Au centre de ce grand paquebot de béton, là où naguère se situait le centre de design Citroën de Jean-Pierre Ploué, DS Automobiles a implanté son studio de design sous une grande verrière.

Le lieu ci-dessus est plutôt sympathique et c’est là que sont conçues les futures DS et où tous les métiers du design sont regroupés : design intérieur, design extérieur, département des couleurs et matières, etc. Un havre de création. Ci-dessous, la maquette de la première génération de DS 4, avec Thomas Duhamel, son designer en arrière plan, au même endroit que ci-dessus dans le studio.

L’épée de Damoclès est toujours là…
Il est donc bien question d’un futur pour la marque française, née en 2014 après s’être émancipée de sa matrice Citroën. Non sans avoir chipé au passage les bijoux de famille que sont la DS et la SM. Pourtant, la dernière intervention assez pessimiste du président exécutif de Stellantis, John Elkann ci-dessous, est alarmante. Elle concernait évidement les droits de douanes aux États-Unis mais aussi et surtout, la réglementation européenne sur l’électrification.

John Elkann a évoqué cette dernière en déclarant qu’elle « était déconnectée de la réalité du marché …/… Les industries automobiles américaine et européenne sont en danger. Et ce serait une tragédie, Mais il n’est pas trop tard si les États-Unis et l’Europe prennent les mesures urgentes et nécessaires. » On imagine également que Stellantis évaluera – ou confirmera – la stratégie à mettre en œuvre lorsque le nouveau big-boss, remplaçant de Carlos Tavares, sera nommé à la mi-2025. De notre balcon, on observe de loin le conclave, en craignant qu’un Italien fasse peur aux Français, qu’un Français fasse peur aux Italiens et qu’un Américain fasse peur aux Européens. Un Martien peut-être ? Jusqu’à hier, il se murmurait qu’Antonio Filosa, le directeur des opérations pour les Amériques et directeur de la qualité, membre du comité exécutif intérimaire et chargé de la direction et de la supervision de Stellantis, tenait la corde…

Immanquablement, les rumeurs fusent et des marques comme DS Automobiles (ci-dessus la nouvelle DS N°4), Lancia qui peine même sur son marché de prédilection en Italie et Maserati seraient en danger. Pas question pour LIGNES/auto, spécialisé dans le design, d’évoquer ces rumeurs. Il n’est pas non plus question de cautionner le ridicule « DS Bashing. » Ce qui ne nous a pas empêché le 15 décembre 2024 d’écrire sur la page Facebook de LIGNES/auto (https://www.facebook.com/lignesauto/) ce que l’on pensait de la présentation de la DS N°8 par l’ancien patron de DS (Olivier François, remplacé depuis par Xavier Peugeot) qui, selon nous, manquait un peu d’humilité. Les équipes de DS Automobiles, elles, font le job, et même très bien. Mais l’industrie automobile reste une industrie lourde à manœuvrer, malgré le raccourcissement des délais de conception. Une situation en total conflit avec l’envie urgente d’en découdre de la part des designers et commerciaux de DS Automobiles !
DS Automobiles : c’est ENFIN reparti !

Après une trop longue période de disette, voici que DS Automobiles se réveille avec coup sur coup deux nouveautés : un produit 100% inédit avec la DS N°8 (à lire ici https://lignesauto.fr/?p=36903) et un restylage avec la nouvelle DS N°4 dévoilée aujourd’hui qui profite de ce lifting pour embarquer dans sa gamme une variante 100% électrique aux côtés des versions hybride et hybride rechargeable.

La DS4 d’hier – devenue DS N°4 aujourd’hui- a toujours été plébiscitée par LIGNES/auto. Pourquoi cacher que cette berline de caractère nous séduit !? Ses designers Thomas Duhamel pour l’extérieur et Sylvain Gaudichon pour l’intérieur, chapeautés par Frédéric Soubirou pour la responsabilité du design extérieur et Thomas Bouveret pour celle du design intérieur, ont fait du bon boulot. Bien aidés par l’équipe de Vincent Lobry qui a une fois encore magnifié l’habitacle, avec des choix de matériaux, de finitions et de couleurs totalement en phase avec ce concept de voiture premium. Alors pour ne pas casser ce joujou qui ne connaît pas encore le succès qu’il mérite (31% des ventes de DS Automobiles quand même, face aux 50% pour la DS7 et aux 19% seulement pour la DS3), les modifications sur le restylage ont été réfléchies et validées mille fois plutôt qu’une. Pour répondre à nos – à vos – questions, qui d’autre que le patron du design de la marque, Thierry Métroz ci-dessous.

Toute étude de mi-vie d’un produit (entre 2 et 4 ans après la commercialisation du modèle) s’appuie sur des enquêtes qui permettent de définir ce qui est nécessaire de modifier et ce qu’il ne faut pas toucher. Sur ce plan, Thierry Métroz est très clair : « la DS4 commercialisée en 2021 a une silhouette caractéristique, athlétique, légèrement plus haute qu’une berline classique, tout en gardant de l’élégance et un bon équilibre avec ses lignes sensuelles. Ce qui la caractérise, c’est son panneau de custode très graphique qui apporte de la tension à la silhouette. »

« La sculpture sur l’aile arrière, faite de formes pleines et creuses a certes été le cauchemar des emboutisseurs mais on a une équipe à Sochaux chargée de ce travail qui est constituée de véritables artistes. La vue arrière est ma préférée avec un côté statutaire, une grande largeur et une attitude sur la route unique ! »

On le comprend, c’est la partie avant qui a été retouchée le plus massivement.
« Tout le travail de l’équipe de Frédéric Soubirou – responsable du design extérieur de la marque – a été de mettre l’avant de la nouvelle DS N°4 dans le monde de la DS N°8. L’air de famille est désormais évident. »

Vous n’aviez pas trop de choix que de changer le soft-nose. Avez-vous touché aux emboutis de tôle ?
« On a effectivement retravaillé l’intégralité du bouclier et on a également investi dans un nouveau capot moteur allongé de plus d’un centimètre et ça modifié complètement la physionomie de l’avant (ci-dessus), plus fin, plongeant et incisif. L’attaque du capot est désormais abaissée et change totalement la perception. »

L’air de famille avec la DS N°8 est évident et pourtant sa signature lumineuse au niveau des DRL semble plus complexe …
« La caractéristique de cet avant est qu’il est commun à toutes les DS N°4, quel que soit le niveau de gamme. Il n’existe qu’une une seule définition de lightning, pour l’ensemble des versions. La grande DS N°8 dispose de DRL verticaux inspirés du concept-car ASL de 2020. En 2022, nous avons dévoilé le concept DS E-Tense Performance (ci-dessous) qui a inspiré à son tour les DRL de la DS N°4. »

Pourquoi la calandre lumineuse de la DS N°4 est-elle proposée sur TOUTES les versions alors que la DS N°8 n’y a pas droit en version d’entrée de gamme Pallas ?
« La DS N°8 dispose d’une définition de lightning plus démonstrative que celle de la DS N°4. Nous voulions aussi proposer aux clients, sur la finition Pallas, une calandre « éteinte », plus consensuelle, sans les grandes lignes verticales lumineuses.

Sur la nouvelle DS N°4, les petites lignes horizontales qui prolongent horizontalement les DRL (ci-dessus) ne sont pas lumineuses. Elles adoptent une nouvelle technologie de marquage à chaud. Nous déposons un film à chaud, d’inspiration chromée sur lequel un vernis de finition ultra-résistant est appliqué. C’est plus éco-responsable et cette technologie nous ouvre les portes sur de potentielles séries spéciales, car on peut opter pour différentes couleurs. Sur la DS N°8 (ci-dessous), les lignes lumineuses sont intégrées dans un écran qui forme l’intégralité de la calandre. C’est évidemment plus complexe et coûteux »

Pourquoi le nouveau volant en « X » de la DS N°8 n’a-t-il pas été retenu sur la nouvelle DS N°4 ?
Il y a eu débat sur ce sujet qui a rapidement été écarté, non pas par une volonté de style, mais parce que l’opération était injouable car « trop coûteuse » nous explique Thierry Métroz. « Les deux voitures ne sont pas conçues sur la même plateforme : la DS N°4 est sur la EMP2 évoluée alors que la DS N°8 repose sur la STLA Medium. Les deux ne disposent pas du tout du même haut de colonne de direction et surtout, ne disposent pas du même pilotage en termes d’architecte électronique. »

« Dès lors, le volant en « X » de la DS N°8 (ci-dessus) était incompatible avec la plateforme de la DS N°4. Développer un volant spécifique, c’est coûteux et long car il faut assurer tous les calibrages d’airbag. Mais on aurait aimé. On le fera sur la prochaine génération ! » Le carry-over poussé à son paroxysme chez Stellantis n’est donc pas totalement transversal entre les différentes plateformes.

Une logique de conception évidente. Il faudra donc attendre la prochaine génération de DS N°4 pour disposer du volant en « X », car elle devrait reposer sur la plateforme STLA Medium, contrairement aux futures compactes de Peugeot par exemple qui reposeront sur la plateforme STLA Small des 208/2008 réaménagées pour ce segment. Pour autant, les deux Peugeot 208 et 2008 de la fin de décennie devraient bénéficier d’une direction 100% électrique “Steer by Wire”. Peugeot rejoindra entre autres Toyota et Mercedes avec cette architecture novatrice en série.

Comme on l’a écrit plus haut et comme souvent dans un restylage, la poupe est sensiblement moins transformée que la proue. Et ce, pour une raison simple : la partie arrière d’une voiture est conditionnée en grande partie par les deux côtés de caisse qui accueille un hayon et ces grands emboutis ne peuvent pas être modifiés pour des raisons évidentes de coût.

« Nous avons modifié les feux écailles en écartant le chrome remplacé par un laqué noir plus élégant et discret et qui met en valeur les écailles rouge. Quant à la nouvelle appellation DS Automobile et N°4, elle est inscrite très proprement et il existe deux couleurs pour elle : sombre sur les teintes claires et inversement sur les teintes foncées. Évidemment, nous conservons le biton sur la nouvelle DS N°4. »

A bord, les évolutions sont moins nombreuses. On note cependant un allègement du nombre d’écrans et une augmentation de taille pour celui placé devant le conducteur.
« L’écran situé à la base de la console disparait – 1 ci-dessous– sur la DS N°4 afin de renforcer la facilité d’utilisation et l’ergonomie. Nos enquêtes avaient souligné une gêne pour le client, donc nous l’avons supprimé. Toutes les fonctions ont été regroupées dans l’écran central et à la base de la console, l’emplacement est devenu un petit rangement pour une carte bancaire ou une télécommande de garage. Quant à la taille du combiné – 2 ci-dessous – , elle évolue à 10,25 pouces, la même taille que l’écran central. Ce nouveau grand combiné améliore la visibilité des informations. »

Vous êtes un patron de design qui veut bannir les écrans à bord. Où en est-on raisonnablement dans cette quête de simplification ?
« Au studio de design, on teste les cockpits du futur (ci-dessous) avec des enquêtes intégrant des clients premium. Leur première demande est « est-ce qu’il y a une commande vocale ». C’est cette interaction prioritaire qui est demandée en premier. Personnellement, je lutte pour faire disparaître les écrans et c’est même une obsession. Je ne supporte pas les écrans « toaster », comme un grille-pain qui d’un seul coup émerge et vient casser l’harmonie et la pureté de l’intérieur. »

Intelligence artificielle, commande vocale… sur quelle technologie peut-on compter pour moderniser l’habitacle de demain ?
« On a de nombreuses technologies qui nous permettent de développer aujourd’hui des intérieurs sans écran. Le premier écueil est que tous les systèmes de pilotage doivent être secondés par une reconnaissance vocale de très haut niveau. Par exemple, elle doit être capable de reconnaître l’ordre du conducteur dans une voiture ou quatre personnes conversent avec des flux sonores guidés et dédiés. Nous travaillons aussi sur des technologies de pilotage par le regard. C’est efficace avec quelques caméras qui suivent et analysent ce que le conducteur regarde et la commande s’effectue alors par le regard. »


