NOUVEAU RENAULT AUSTRAL – Interview Gilles Vidal, directeur design Renault : “le designer doit avoir un petit côté Geek !”

A l’occasion de la présentation du nouveau SUV compact de Renault, l’Austral, nous avons rencontré Gilles Vidal, directeur du design Renault pour faire un point, 18 mois après son arrivée chez le constructeur français.

Renault a dévoilé une première image de son prochain concept-car, ci-dessus. C’est votre premier bébé, 18 mois après votre arrivée à la tête du design ?
Gilles Vidal : « Oui, on peut dire que c’est la première vraie expression de la nouvelle équipe. Mais il y aura quand même d’autres véhicules qui vont sortir en série avant la version de production de ce concept-car. »

L’Austral est dévoilé aujourd’hui. En termes de design, était-ce une volonté de reprendre certains codes de la Mégane électrique sur ce SUV thermique ?
G.V. : « Pas forcément. A l’avant de la Mégane, il se passe quelque chose d’un peu différent. L’Austral qui est thermique dispose d’une calandre plus généreuse. Elle a récupéré sur les versions hautes la lame sport à la base du bouclier qui a été ajoutée après mon arrivée. En langage de forme il y a cette idée qui a commencé à être cultivée avant mon arrivée avec un mélange de formes généreuses et des plis vifs, plus structurés avec des éléments comme les feux plus technologiques. Mégane et Austral sont le début de cette philosophie qu’on va développer. C’est notre fil rouge. »

Aux côtés de l’Austral, on voit avec la Mégane E-TECH que les proportions des véhicules électriques donnent naissance à des volumes inédits. Citons aussi la Mercedes EQS presque ovoïde ! C’est une tendance lourde ?
G.V. : « L’ère des véhicules électriques nous offre plus d’options, comme le style « one box » que vous évoquez, avec des petits nez, un pare-brise avancé et toujours cette recherche aérodynamique. Il y a un retour vers ce design que j’appellerai ‘aquatique’, très aérodynamique, voire hydrodynamique. On voit notamment ce phénomène avec les Tesla et les dernières marques de Chinoises électriques. »

Tous les constructeurs vont suivre cette voie ?
G.V. : « Attention, il faut quand même garder une personnalité forte, savoir se différencier, trouver notre voie, notre manière de faire ! »

La planche de bord de l’Austral est spécifique, bien qu’elle reprenne le concept de l’écran OpenR de la Mégane E-TECH.

A bord de l’Austral, ci-dessus, on sent que vous avez rattrapé votre retard sur vos concurrents…
G.V. : « C’était déjà amorcé quand je suis arrivé. Renault voulait bouger les lignes sur le design intérieur. Nous recherchons quelque chose qui soit à la fois révolutionnaire, de progressiste mais qui ait du sens en termes d’expérience, de « voiture à vivre » notamment en prenant soin de l’ergonomie, de l’interaction et cette intelligence de l’usage. L’arrivée de l’écran OpenR devient la colonne vertébrale de la planche de bord. Hier, on dessinait un beau tableau de bord et on mettait dedans les évolutions technologiques. Désormais on conçoit l’interaction (écran, ergonomie, architecture) et on fabrique une belle esthétique autour. »

Ce n’est plus le même métier pour les designers intérieur ?
G.V. : « Disons que c’est un vrai métier de designers, pas de stylistes ! Mais les designers intérieurs, hors spécialiste des UX (User Experience) savent à la base manipuler ce type de chose. Après, il n’y a pas que l’OpenR, il y a tout le côté ultra-progressiste en termes de formes, pour la planche autant que pour la console, les commandes, les panneaux de portes. Tout est cohérent dans un langage de forme assez nouveau. »

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Les aérateurs horizontaux sur la largeur de la planche évoquent la ventilation à l’époque novatrice de la Renault 16 de 1965, c’est voulu ?
G.V. : « Ce qu’on ne voulait pas, c’est de sur jouer le design des aérateurs en termes d’apparence ou de présence… Les deux verticaux à gauche et au centre sont cachés dans l’Open R. Ca parait simple comme ça, mais c’est compliqué à concevoir ! C’est de la construction fine, et très intéressante. Je trouve que les ingénieurs ont été très bons à ce niveau-là, parce que c’est impeccable. Les aérateurs passent inaperçus, et le regard se porte sur les belles formes et les décors de la planche de bord. »

DESSIN DE DAMIEN DURAND

Il y a entre 10 et 100 millions de lignes de codes dans les softwares d’une voiture de 2022 et on en attend jusqu’à 300 millions dans les voitures autonomes et totalement connectées. Pour être à la page dans ce futur, vous embauchez des designers dans l’univers des jeux vidéo !?
G.V. : « Nous avons comme tous les constructeurs des équipes UX (User Experience) transversales. Mais c’est vrai que certains designers peuvent venir de l’univers du cinéma ou du gaming. Forcément, ce sont des embauches plus compliquées, mais nous avons anticipé cette révolution voici une dizaine d’années ! Dès le départ, nous avons eu l’intuition de ne pas mettre des designers formés à l’automobile dans ces nouveaux univers UX. On a dû créer des équipes avec des gens qui venaient d’ailleurs, qui maîtrisaient cet aspect. Et ces équipes devaient être pertinentes pour l’automobile. Le designer aujourd’hui doit avoir en lui un petit côté geek ! »

PHOTO GREG – RENAULT COMMUNICATION

Vous être directeur du design Renault depuis 18 mois maintenant. Cela a impliqué beaucoup de changement dans les équipes ?
G.V. : « En fait il y a eu des changements pour tout le monde car quand je suis arrivé, tout le design du groupe se réorganisait par marque, ce qui n’était pas dans l’héritage de Renault. Les designers pouvaient dessiner une Renault, une Alpine ou une Dacia avant cette réorganisation. »

Chez PSA, vous avez été habitué à ce fonctionnement par marque…
G.V. : « Non, ce n’est pas tout à fait la même chose, car Renault était une marque unique. Ce ne sont pas des marques extérieures qui se sont ajoutées au portefeuille, mais des marques venues de l’intérieur, comme Dacia ou Alpine et Mobilize. La culture était différente. A son arrivée, Luca de Meo a imposé des ‘business unit’ par marque, avec des CEO et des responsables design par marque. Ça a été un grand changement pour les équipes design. Ensuite, il y a eu un plan de départs volontaires, autant pour les ingénieurs que pour les designers. A chaque départ dans mon équipe, j’ai recruté un nouveau designer et aujourd’hui, je n’ai pas moins de sept nouveaux designers ! Alors, oui, pour moi qui arrivais chez Renault, c’était nouveau, mais pour les designers historiques aussi ça a été un vrai changement d’organisation. »

La Renault 5 Prototype 100% électrique était gelée à l’arrivée de Gilles Vidal mais tout est à inventer à bord !

Combien avez-vous de créatifs purs dans votre équipe ?
G.V. : « L’équipe design sous ma responsabilité, c’est 65 personnes pour la création pure, et il faut ajouter les services mutualisés, les équipes transversales comme les maquettiste, la CAO et donc ajouter pratiquement autant de personnes. C’est une activité de 120-125 personnes pour le design de la marque Renault. »

Lisez notre enquête réactualisée sur le mercato des designers entre Renault et Stallantis : http://lignesauto.fr/?p=24229

Vous avez votre studio dédié à Renault, comme dans une bulle ?
G.V. : « Non, il faut comprendre comment on est organisé au design. Il y a une mezzanine avec les designers, c’est ouvert même si chaque équipe est regroupée par marque. En dessous, il y a les ateliers avec des zones bien définies. Ce n’est pas fermé, on peut échanger. Et comme j’ai beaucoup de projets en cours, j’ai des maquettes dans tous les coins ! »

PHOTO : Takuji Shimmura

La voiture autonome semble bien endormie aujourd’hui…
G.V. : « Sans doute parce que tous les constructeurs ont dû investir à marche forcée dans la voiture électrique. Pourtant, techniquement, il n’est pas compliqué de mettre toutes les briques techniques pour que ça fonctionne. Peut-être faut-il se demander aussi si l’acceptabilité pour l’utilisateur est actée ? »

Merci à Gilles Vidal pour le temps qu’il nous a accordé et à la communication Renault pour avoir organisé cette rencontre.

L’AUSTRAL en images

Une finition “Esprit Alpine” apparaît sans modification technique mais avec des jantes spécifiques de 20 pouces, de l’Alcantara à bord, des sigles Alpine sur les appuie-têtes et sur les ailes, et une teinte dédiée : le gris Schiste satin. Elle peut recevoir l’équipement 4Control Advanced : quatre roues directrices.
Techniquement, l’Austral dispose de motorisations essence hybrides. 4 cylindres mild-hybride 12 volts de 140 et 160 ch. S’ajoute un 3 cylindres 1.2 litre turbo hybride 48 volts de 130 ch et, avec ce même moteur, les deux versions full hybride “E-TECH” de 160 et 200 ch.
Gilles Vidal a réussi à implanter sur l’Austral les feux arrière en plexi acrylique, dans lesquels sont gravés des motifs qui donnent un effet tridimensionnel.
Le bouclier des versions d’entrée de gamme est différent et ne dispose pas des lames sportives vues sur la Mégane E-TECH.
Outre une banquette arrière coulissante sur 16 cm, l’Austral bénéficie d’une console “grand confort” dont le couvercle coulisse, libérant différents espaces de rangements. Le repose main permet en position avancée de poser le poignet afin de pianoter sur l’écran de façon plus confortable. Il y a là un petit côté Scénic bienvenu…
La plateforme CMF/CD de la 3e génération, proposant des moteurs thermiques hybrides, est utilisée pour la première fois par Renault. Elle est différente de la CMF/EV 100% électrique de la Mégane E-TECH.
L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est LOGOActus_BD-1024x367.jpg.
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